La plupart des horlogers indépendants sont perçus comme inabordables ; il s’agirait d’inspirés créateurs réservés à une poignée d’amateurs avertis. C’est oublier un peu vite qu’indépendance ne rime pas toujours avec élitisme. Chez Eberhard, c’est même le contraire.
PAR OLIVIER MÜLLER
La marque fête cette année ses 125 ans de production horlogère ininterrompue, là où même les plus grandes enseignes ont éteint leurs CNC durant la crise du quartz. Mais l’on ne trouvera chez Eberhard ni tambours ni trompettes : la maison cultive la discrétion, revendique son héritage culturel, son positionnement et son amour de la belle mécanique accessible au plus grand nombre.
Son CEO, Mario Peserico, revendique cette différence. Pour autant, la plupart des maisons positionnées sur le même segment poursuivent deux objectifs : montée en gamme et préemption d’un territoire de marque. Ce second objectif se paie le plus souvent à coup de vastes campagnes de communication pour rappeler ses valeurs historiques (Breitling et l’aviation) ou pour se les construire de toutes pièces (Bell & Ross et l’armée). Rien de tout cela chez Eberhard. Tout au plus, une affinité avec l’univers automobile. Mais la marque refuse de s’enfermer dans un univers et clame haut et fort sa liberté de pensée comme d’action.
Cette liberté, Eberhard l’utilise pour se construire sur quatre principales lignes de produits ainsi qu’une ligne femme (quartz). C’est peu, répondraient la plupart des experts. “Certes, mais c’est suffisant”, répond le CEO. Et force est de constater qu’Eberhard dispose de modèles sport, urbains, classiques, homme et femme, techniques ou basiques, avec ou sans complication, avec les multiples combinaisons possibles entre ces variables.
Aujourd’hui, Eberhard s’est offert une extravagance : une série limitée pour ses 125 ans. C’est l’une des pièces maîtresses de son exposition à Belles Montres. On y retrouve les principes fondateurs de la marque : bienfacture, élégance, accessibilité, soutenus par un design intemporel.
Eberhard ne fait pas non plus mystère de l’origine de ses mouvements. La transparence est de mise, chaque acquéreur se voit expliqué en détail l’origine de son mouvement, son fonctionnement, les modifications qui y ont été apportées, etc.
Au final, le seul regret relatif à Eberhard est qu’il n’y ait pas davantage de marques comme elle. Le dogme commercial suivant lequel le segment avoisinant les 3000 – 3500 euros est le théâtre de la plus féroce compétition n’a plus vraiment cours. En effet, face à Eberhard, rares sont les marques à offrir ce niveau de qualité, cette transparence et cette lisibilité de gamme. Beaucoup prétendront pouvoir faire de même. Peu pourront le prouver.
L’AUTEUR: OLIVIER MÜLLER