La rencontre entre deux grands noms suscite toujours l’attente et des pronostiques. Qui aurait pu s’attendre au remarquable résultat de la collaboration entre Maximilian Büsser et Alain Silberstein? Nous pourrions alors tenter d’analyser le résultat et d’en tirer des conclusions, mais ne serait-ce pas seulement effleurer l’évènement sans en comprendre les rouages? Pour mieux comprendre “le pourquoi du comment” nous avons questionné ces deux grands monsieur de l’horlogerie.
Questions à Maximilian Büsser
T.H: Monsieur Büsser, que représente pour vous cette collaboration?
M.B: Le plaisir de créer ensemble avec quelqu’un que j’admire depuis plus de 20 ans. Le stand d’Alain est un des rares que je me faisais un devoir de visiter chaque année au début de la Foire de Bâle. Sans faille, pendant 19 ans, il a réussi à m’étonner et à me faire sourire.Pour moi c’est une collaboration et c’est aussi ma façon de lui dire merci.
T.H: Après le modèle HM2 Only Watch nous voyons naitre HM2.2. Pourquoi avoir choisit une base HM2 pour ces modèles?
M.B: HM2 est une plateforme dans tous les sens du terme. Techniquement, elle est totalement modulable, grâce à ses 102 composants. Esthétiquement elle permet une grande surface d’expression, et en accumulant les créateurs qui travaillent dessus (le premier fut en effet l’artiste américain Sage Vaughn pour Only Watch), elle permet de mieux identifier les styles et idées de chacun en offrant un point de comparaison.
T.H: Quelle fut votre réaction à la vue de la HM2.2?
M.B: Je suis resté initialement bouche-bée. En donnant carte blanche à Alain, je m’attendais, comme beaucoup, à un festival de couleur ! Ai donc résisté à la tentation de l’appeler dès la réception du dessin, puis suis revenu le lendemain et déjà un peu comme le Petit Prince et le Renard, le dessin m’avait apprivoisé, et le 3ème jour j’étais conquis. Petit à petit il m’est apparu que cet objet est pur, fort et beau – il demande un travail pour se l’approprier, mais après il est éternel.
T.H: Les montres MB&F sont très masculines, à la limite du design automobile, pourtant la ligne directrice reste le travail artistique et non le coté « sportif », est-ce une manière de se démarquer?
M.B: C’est bizarre, je n’ai jamais pensé à nos créations comme sportives! En fait elles sont assez indéfinissables car elles émanent des multiples facettes d’une vie et des passions qui l’émaillent. J’admire particulièrement la belle horlogerie du 18ème siècle et, ce qui n’a strictement rien à voir, ai été fasciné par la culture manga/science-fiction de mon enfance. Les deux se retrouvent donc dans nos œuvres… MB&F c’est finalement un peu l’histoire d’une introspection – certains diraient d’une thérapie…
T.H: On voit naitre de plus en plus de séries limitées, cela semble une réponse à la crise, qu’en pensez-vous?
M.B: Les séries limitées sont reines depuis plus de 15 ans. Il faut démarquer le fait qu’un créateur annonce qu’il n’y aura que tant de modèles produits dès le départ de sa mise sur le marché, et les marketeurs qui changent le métal de la boîte ou la couleur du cadran en cours de vie pour artificiellement rehausser l’intérêt commercial. Tant qu’il y a des acheteurs naïfs pour tomber dans le panneau, le concept de série limitée à encore beaucoup d’avenir!
Questions à Alain Silberstein
T.H: Monsieur Silberstein, le résultat de la HM2.2 en a surpris plus d’un, comment avez vous réussit a conjuguer l’âme de MB&F et votre style personnel?
A.S: L’âme de MB&F s’appelle Maximilian Büsser. Il y a une alchimie mystérieuse qui s’appelle l’empathie qui permet de se comprendre au-delà des mots. J’ai eu beaucoup de plaisir à vivre cette aventure horlogère avec Max et cela transparaît dans ma création. Tout simplement.
T.H: La collection Karavan ne vous a-t-elle pas inspiré dans ce projet?
A.S: C’est le hasard qui fait que ces deux modèles ont deux hublots distincts (dans le cas de la Karavan, ce sont aussi deux boîtiers et mouvements distincts).
T.H:Parlez nous de l’inscription sur le coté du boitier
A.S: Stendhal a écrit : « le vrai bonheur est d’avoir son métier pour passion »
Quand à l’âge de 40 ans, j’ai fait le choix avec ma femme Sylvie d’une nouvelle aventure professionnelle en créant une entreprise d’horlogerie, cette phrase de Stendhal s’est imposée à nous comme devise de notre marque en inversant ses termes : « avoir sa passion pour métier »
T.H: Alain Silberstein c’est une communication discrète, en totale opposition avec votre style, la HM2.2 représente quelle partie de votre personnalité?
A.S: Ne mélangons pas communication et style !
La HM2.2 est une véritable création Alain Silberstein, une création à quatre mains avec Maximilian Bûsser ; un exercice de style qui nous a enrichis et qui, je l’espère, trouvera son public.
Vous avez raison sur un point : la communication des montres Alain Silberstein est trop discrète ; nous y travaillons.
T.H: Ce fut une année mouvementé pour votre société pensez-vous que la tempête soit derrière vous à présent?
A.S: La tempête est loin d’être apaisée dans le monde horloger et nous sommes actuellement dans l’œil du cyclone ; profitons de cette accalmie pour identifier les partenaires qui vont nous accompagner ces prochaines années pour pérenniser notre marque.